Peu d’entre nous auront l’occasion de voyager au cours des vacances estivales cette année. D’ici à ce que la vie reprenne son cours normal, nous avons pensé qu’il serait à propos de vous parler de voyage, plus précisément de l’aventure de Richard Gauthier. Actuaire retraité et membre de l’ICA, Richard réalise un rêve qui remonte à son adolescence, soit de parcourir le monde à bord d’un voilier. L’équipe des communications de l’ICA a eu la chance de discuter avec lui tandis qu’il était ancré à Norfolk, en Virginie. Voici un résumé de notre échange avec lui : vous pouvez aussi écouter l’entrevue qu’il nous a accordée en français et en anglais.
Diplômé de l’Université Laval en 1980, Richard Gauthier a travaillé aux quatre coins de l’Amérique du Nord. Pendant trois décennies, son parcours professionnel l’a amené à travailler en Californie, à Toronto, à Ottawa et à Vancouver pour de grandes entreprises telles que PriceWaterhouseCoopers et TD Assurances. Cependant, il n’avait pas l’intention de passer sa retraite sur la terre ferme. « La mer et l’eau, ça fait partie de mon ADN. »
Une passion héréditaire et un tableur
La passion pour la navigation semble effectivement se transmettre de génération en génération chez les Gauthier : le grand-père de Richard avait un bateau et ses parents aussi. « Ça fait belle lurette que j’ai les pieds mouillés! » Au secondaire, Richard rêvait déjà de faire le tour du monde en voilier. Il organisait des voyages de voile dans les Caraïbes à l’université. Bien qu’il doive prendre une pause de la voile durant quelques années pour s’occuper de sa jeune famille, en 1992, il prend les grands moyens pour concrétiser son rêve : il prépare un tableur. L’actuaire y calcule les sommes nécessaires pour prendre sa retraite à 55 ans et s’acheter un voilier.
Il atteint son objectif à 59 ans. « J’ai pris ma retraite le 30 avril 2017. Un mois plus tard, je prenais possession de mon bateau. » Lui et sa conjointe, Ann Graydon, qui est infirmière retraitée, vivent à bord de leur catamaran depuis cette date. Le couple parcourt les foires de bateaux et en essaie plusieurs avant d’arrêter son choix sur l’Outremer 51, un catamaran assez confortable pour être habité à temps plein, mais assez performant pour faire de la régate. Le couple débute son aventure en explorant plusieurs des pays et des îles de la Méditerranée : l’Espagne, la France, la Sardaigne, la Corse et la Tunisie.
Quelques épisodes mémorables
Il fait une chaleur écrasante de 42 degrés en Tunisie lorsque le couple lève l’ancre pour se diriger vers Malte et la Grèce. En route, alors que Richard est en veille, le catamaran croise un bateau en détresse, soit une barque d’environ deux mètres à bord de laquelle se trouvent cinq réfugiés. Partis de la côte africaine, les réfugiés étaient en route vers l’Europe lorsque leur moteur de leur embarcation est tombé en panne. Ils sont à la dérive. Le catamaran doit faire demi-tour 500 mètres plus loin pour effectuer les manœuvres et descendre les voiles. Richard et Ann appellent la garde côtière italienne et attendent l’arrivée de cette dernière avec les réfugiés.
À la fin novembre 2019, ils partent de Las Palmas, dans les îles Canaries, pour effectuer la traversée de l’Atlantique en 17 jours. Le voyage est extraordinaire. L’équipage est composé de cinq personnes qui ne dorment que trois à quatre heures à la fois et se remplacent à tour de rôle pour effectuer des quarts de veille. Chemin faisant, l’Outremer 51 croise des dauphins, des baleines et… un navire de guerre marocain, ce qui donne lieu à un drôle d’échange par l’entremise de la radio VHF. Au total, ils n’utiliseront que 20 litres de diesel pour produire un peu d’électricité. L’actuaire retraité raconte que les mois passés en mer et la traversée ont exigé une grande capacité d’adaptation. « On gagne une grande confiance en soi à travers la gestion de situations imprévues », affirme-t-il.
Prochaines aventures et conseils sages
Lorsque la pandémie a été déclarée, le couple est ancré du côté hollandais de l’île Saint-Martin. L’une après l’autre, les îles ferment leurs portes aux étrangers. « On pouvait nager autour de notre bateau, mais aucune destination n’était possible aux alentours », explique Richard. Compte tenu de la situation et du fait que la période des ouragans approche, Anne et lui décident de remonter la côte est Américaine. Au fil des prochains mois, ils prévoient explorer la baie de Chesapeake et ensuite tranquillement remonter vers le Maine durant les mois d’été. Si la frontière rouvre, il est aussi prévu de retourner quelques semaines au bercail, à Toronto, pour l’entretien des œuvres vives, la partie immergée du bateau. Avant qu’il ne fasse froid, Richard et Ann redescendront vers le sud. « Peut-être les Bermudes ou les Bahamas », explique Richard. « Mais on pourrait changer d’idée ».
Ça prend décidément beaucoup de passion et de courage pour se lancer dans pareille aventure. Pour conclure l’entrevue, nous avons donc demandé au capitaine de l’Outremer 51 s’il avait des conseils à offrir à ceux d’entre nous qui rêvent de concrétiser un projet de cette envergure. Vous vous en doutez, c’est l’actuaire qui nous a répondu : « Comme actuaire, on le sait, planifier à long terme, c’est important. C’est la même histoire lorsqu’il s’agit d’accomplir vos rêves. On fabrique sa propre chance en planifiant à long terme. »
Cet article a été publié initialement dans l'(e)Bulletin de l’ICA.