Par Steve Bocking, FICA, et Marie-Andrée Boucher, FICA, respectivement vice-président et présidente de la Commission des rapports financiers des compagnies d’assurance-vie (CRFCAV)
L’expérience liée aux répercussions de la COVID-19 sur la mortalité des assurés est très préliminaire et celle-ci commence à peine à émerger. À défaut d’avoir de l’information et des données plus robustes à ce sujet, voici quelques considérations liées aux hypothèses de mortalité :
- Plusieurs sociétés d’assurances de personnes utilisent davantage une souscription de type accéléré. Cette pratique leur permet de continuer à émettre des produits à une plus grande proportion de la population en période de distanciation sociale, alors qu’il est difficile d’obtenir des prélèvements et des tests paramédicaux. Les actuaires devraient tenir compte des répercussions potentielles de cette forme modifiée de souscription sur l’hypothèse de mortalité. Le paragraphe 2350.06 des normes de pratique et la section 610 de la note éducative sur la mortalité attendue constituent de bons rappels pour les actuaires au sujet de la souscription et de la mortalité assurée.
- La présence de conditions préexistantes et de comorbidité peut influer sur le taux de mortalité des personnes qui contractent le virus, ce qui mène aux considérations suivantes :
- Le niveau de souscription influencera-t-il l’ampleur des répercussions sur les taux de mortalité? Si tel est le cas, est-ce que cela va se traduire par un impact plus important sur les produits à court terme tels les produits temporaires comparativement aux produits à plus long terme comme la vie universelle?
- Les polices tarifées selon ces conditions subiront-elles des répercussions plus défavorables que les polices émises de façon standard ou préférentielle?
- La hausse des taux de mortalité observée au cours de la crise de la COVID-19 peut être en partie attribuable à une accélération des paiements pour sinistres qui se seraient produits dans un proche avenir. Cela pourrait avoir une incidence favorable sur les taux de mortalité après la crise. Les cohortes de polices qui suivront la COVID-19 afficheront-elles une meilleure mortalité que les cohortes qui ont précédé la COVID-19, alors que plus de personnes à risque succomberont au virus?
- La mise en œuvre de mesures de confinement et de distanciation sociale limite la mobilité et l’activité des individus. Est-ce que cela se traduira par des taux de mortalité plus faibles liés aux décès accidentels durant cette période? Dans l’affirmative, la durée de la période de confinement et tout changement permanent relativement aux comportements sociaux pourraient influer sur les taux de mortalité liés aux décès accidentels.
- Les pressions qu’exercent la situation de la COVID-19 sur le système de santé ont entraîné des retards pour d’autres procédures médicales. Certaines personnes peuvent aussi craindre de contracter la COVID-19 ou ne pas vouloir représenter un fardeau supplémentaire pour le système de santé, de sorte qu’elles pourraient retarder leur visite à l’hôpital ou la consultation d’un médecin. Cela soulève les questions suivantes :
- Allons-nous connaître des taux de mortalité plus élevés pour d’autres causes de décès (cancer, maladies chroniques, etc.) au cours des prochaines années en raison du report de certains traitements et chirurgies pendant la crise de la COVID-19?
- Serons-nous confrontés à des effets collatéraux liés à l’accent mis sur la maîtrise de la situation de la COVID-19 qui pourraient avoir un effet néfaste sur les personnes atteintes d’autres conditions médicales?
- Les efforts associés à la détection des maladies et d’autres conditions potentiellement mortelles seront-ils réduits pendant la crise?
- À l’heure actuelle, l’incidence des méthodes de traitement (p. ex. les antiviraux) et la possibilité d’avoir un vaccin demeurent très incertains. Tel qu’observé par le passé, les méthodes de traitement peuvent entraîner une diminution plus importante que prévu des taux de mortalité. À quelle vitesse l’impact de la COVID-19 sur l’hypothèse de mortalité s’atténuera-t-il au fil du temps?
Bien qu’il existe actuellement plus de questions que de réponses, il s’agit de quelques considérations que les actuaires seraient encouragés à analyser et à examiner lorsqu’ils évaluent la pertinence de leur hypothèse de mortalité.
L’ICA collabore activement avec plusieurs assureurs du marché canadien afin de recueillir des données dans le contexte de la COVID-19. L’ICA souhaite obtenir des données sur la mortalité assurée. Restez à l’affût des mises à jour à ce sujet.
Publications de l’ICA sur l’hypothèse de mortalité
Nous invitons les actuaires à prendre connaissance des extraits suivants de ces publications de l’ICA :
- Les paragraphes 2350.06 à 2350.14 qui portent sur la mortalité des personnes détenant des polices d’assurance-vie et sur la mortalité des rentiers conformément à la sous-section 2350 des Normes de pratique.
- La section 5.1 (Risque de mortalité) du document de recherche intitulé Considérations relatives à l’élaboration d’un scénario de pandémie.
- La section 600 de la note éducative intitulée Mortalité attendue : Polices canadiennes d’assurance-vie individuelle entièrement souscrites, qui traite des différents ajustements qui pourraient être apportés pour tenir compte des facteurs susceptibles d’influer sur les résultats de mortalité.
Cet article fait partie d’une série d’articles axés sur la pratique provenant de la Direction des conseils en matière d’actuariat. Lisez le prochain article sur les régimes de retraite par Jared Mickall.
Cet article reflète l’opinion de l’auteur et il ne représente pas une position officielle de l’ICA.
Cet article a été publié initialement dans le Carrefour COVID-19 de l’ICA.