Cet article a été publié initialement dans l'(e)Bulletin de l’ICA.
Par Marc Tardif, FICA
Président de l’ICA
Alors que nous naviguons en territoire inconnu depuis quelques semaines, la capacité d’adaptation de notre société et de ses institutions est mise à rude épreuve. Heureusement, les nouvelles technologies des communications permettent à de nombreuses organisations de rester à flot. En effet, qu’il s’agisse de télétravail, de médias sociaux ou de formation en ligne, les divers outils de communication à notre portée nous permettent d’échanger avec nos collègues afin de poursuivre notre réflexion commune.
Dans ces temps d’incertitude, ce n’est pas le moment de rester invisibles. Les actuaires ont un rôle important à jouer pour assurer la sécurité financière des Canadiens. Il y a quelques semaines, pour continuer à soutenir nos membres, l’Institut a choisi de tirer pleinement profit de la technologie et de créer des espaces d’échange virtuel. Votre réaction a été instantanée : à peine quelques heures après en avoir fait l’annonce, l’ICA comptait des centaines d’inscriptions pour sa toute première assemblée virtuelle sur la COVID-19.
Des pistes de réflexion
Le 3 avril, j’ai donc eu le plaisir d’agir à titre de modérateur durant cette toute première assemblée virtuelle de l’ICA concernant les retombées de la COVID-19 sur le travail des actuaires. Pour la webémission en français, les actuaires Bernard Morency, Benoit Miclette et Michel St-Germain sont venus partager leurs analyses. En anglais, ce sont les actuaires Steve Easson, Jason Malone et Alison Rose qui ont partagé leurs réflexions. Si vous n’avez pas eu l’occasion d’assister à cette assemblée, j’en profite pour vous faire part des faits saillants de nos discussions dans ce billet. J’espère ainsi vous offrir un avant-goût des échanges stimulants qui auront lieu lors de nos prochaines assemblées virtuelles.
Notre premier invité, Bernard Morency a comparé la crise actuelle avec la crise financière de 2008, qui était plus restreinte sur le plan géographique. Aujourd’hui, on fait face à crise sanitaire qui provoque une crise économique à l’échelle planétaire. Bernard a aussi abordé plusieurs points intéressants en lien avec le leadership en temps de crise, notamment l’importance du partage des rôles entre l’équipe de direction d’une organisation et son conseil d’administration. À cet effet, il a offert une analogie pertinente en comparant l’organisation à un bateau qui navigue en pleine tempête où « le capitaine, c’est le président-directeur général; l’équipage sur le pont, c’est la direction. Le conseil d’administration, lui, c’est la vigie en haut du mat qui essaie de voir un peu plus loin et qui observe ce qui se passe sur le pont ».
Les invités Benoit Miclette et Steve Easson ont parlé des produits d’assurance de personnes. Benoit a partagé plusieurs réflexions concernant les impacts de la COVID-19 sur les produits, mais il a tenu à rappeler que les comportements humains sont difficiles à prévoir et a invité les participants à réfléchir aux indicateurs à surveiller. Il nous a rappelé l’expérience qu’il avait notée sur les produits d’assurance santé lors de la crise de 2008 alors qu’il travaillait aux États-Unis. Il prédit que la modélisation prédictive pourrait jouer un rôle important dans les prochains mois. Steve Easson a, quant à lui, a souligné le peu d’information médicale disponible sur la COVID-19 et les difficultés que cela engendre lors de l’évaluation des demandes en assurance-invalidité.
Jason Malone et Michel St-Germain, notre président désigné, ont parlé des nombreux défis auxquels font face les actuaires en régimes de retraite. Il est possible que certains régimes ne survivent pas et que les rentes soient alors réduites : les actuaires seront appelés à examiner les mesures à prendre pour gérer ces situations. D’après Michel, la crise actuelle démontre, une fois de plus, l’écart important entre les régimes à cotisations déterminées et à prestations déterminées. Par ailleurs, Michel a mentionné qu’il s’agissait de la quatrième crise qu’il voyait depuis 2000 : il croit que les actuaires doivent réfléchir à leurs modèles de projection et à la justesse de ces modèles afin de mieux tenir compte de crises potentielles. Jason en appelle aux actuaires pour trouver des approches novatrices afin de soutenir et mieux outiller les retraités qui arrivent à l’étape de décaissement. La communication entre les actuaires et leurs clients prend toute son importance.
À titre de présidente de la Direction de l’éducation et de la qualification, notre dernière invitée, Alison Rose a parlé des colloques, ateliers et examens reportés et des nombreuses organisations actuarielles qui se sont mobilisées en réponse à la COVID-19. La crise soulève plusieurs enjeux et elle prévoit que nous aurons un grand besoin de bénévoles dans le domaine de la recherche actuarielle.
Prochaines discussions et Carrefour COVID-19
Les experts invités nous ont offert beaucoup de matière à réflexion et les participants ont, eux aussi, contribué en soulevant plusieurs questions pertinentes. Cette première expérience d’assemblée virtuelle pour la COVID-19 a été un événement riche. Je vous invite à écouter l’enregistrement (en français et en anglais) et à participer aux assemblées virtuelles qui auront lieu au cours des prochaines semaines. Les prochaines assemblées donneront lieu à des discussions plus approfondies puisqu’elles porteront sur les répercussions de la crise sur des domaines précis, soit les assurances IARD, les régimes de retraite et la planification de la retraite, et l’assurance de personnes.
En dernier lieu, je tiens à vous orienter vers un autre espace virtuel : le Carrefour COVID-19 de l’ICA. Durant la crise, l’Institut invite les membres à y mettre en commun leurs ressources utiles.
Ainsi, bien que plusieurs échéanciers et événements (comme act20) soient repoussés et pourraient être touchés davantage au cours de l’année, je pense que nous nous sommes dotés de lieux d’échanges pour nous épauler durant la pandémie et maintenir le cap. Les actuaires sont une source d’analyse fiable et objective pour les assureurs, les administrateurs de régimes de retraite, les décideurs politiques et le public. Nous avons un rôle important à jouer dans le climat d’incertitude actuel : plus que jamais, c’est le temps de contribuer et de s’impliquer.
Marc Tardif, FICA, est le président de l’Institut canadien des actuaires.